Cardiologie
Maladie cardiovasculaire : la Lp(a) améliore l’évaluation du risque
Un score comme le AHA PREVENT évalue correctement le risque d’événements cardiovasculaires, y compris chez les personnes avec Lp(a) élevée (≥125 nmol/L). Ajouter la Lp(a) améliore modestement la prédiction chez les patients à risque bas ou faible-intermédiaire. Une mesure unique de la Lp(a) peut affiner la décision thérapeutique individuelle sans remettre en cause l’usage des scores comme outil de base.

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La lipoprotéine(a), une particule de type LDL largement déterminée génétiquement, est augmentée chez environ 20 % des adultes et associée à une maladie cardiovasculaire athéroscléreuse (ASCVD), une coronaropathie et une insuffisance cardiaque. Tandis que le score PREVENT s’impose comme nouveau calculateur de risque en prévention primaire et intègre davantage de facteurs métaboliques tout en retirant la race, la Lp(a) n’y figure pas. Cette étude de cohorte a donc évalué la performance de PREVENT chez des personnes avec Lp(a) élevée et l’apport potentiel d’y ajouter Lp(a).
Deux populations multiethniques exemptes de maladie cardiovasculaire au départ ont été analysées dans une étude publiée dans le JAMA Cardiology : MESA (2000–2018, n = 6670) et UK Biobank (2006–2022, n = 308 113), soit 314 783 participants. Les taux d’événements observés à 10 ans se sont globalement alignés sur les catégories de risque prédites par PREVENT, quel que soit le niveau de Lp(a). Néanmoins, une Lp(a) élevée est restée indépendamment associée à un sur-risque de maladie cardiovasculaire (HR 1,30 ; IC à 95 % 1,22–1,38). L’ajout de la Lp(a) au score PREVENT fournit un gain prédictif modeste pour l’évaluation du risque cardiovasculaire (NRI continue 0,058 ; IC à 95 % 0,043–0,065 ; NRI catégorielle 0,006 ; 0,004–0,011).
Ce que montrent les sous-analyses : où se situe le bénéfice additionnel
Le bénéfice de reclassification est le plus net chez les patients à risque bas (<5 %) et « borderline » (5 à <7,5 %), lorsque la Lp(a) est considérée de façon continue. Pour la coronaropathie, l’amélioration de la prédiction est surtout visible aux extrêmes (bas et haut risque). Les associations vont dans le même sens pour l’insuffisance cardiaque et le composite de maladie cardiovasculaire total, avec des événements plus fréquents chez les sujets à Lp(a) élevée au sein de chaque catégorie PREVENT.
Dans MESA, l’ajout de la Lp(a) pour la coronaropathie s’accompagne d’une NRI continue de 0,141, et de 0,079 en analyse poolée. L’interaction selon la catégorie de risque pour la coronaropathie n’est pas significative (p = 0,31), ce qui suggère un effet relativement constant, quoique cliniquement plus exploitable aux niveaux de risque bas à intermédiaires.
Comment intégrer la Lp(a) sans complexifier à l’excès
Les analyses (menées le 25 mars 2025) ont reposé sur des modèles de Cox ajustés sur l’âge et le sexe, avec catégories de risque à 10 ans prédéfinies pour la malaie cardiovasculaire athéromateuse, la coronaropathie, l’insuffisance cardiaque et les évènements CV totaaux ; l’amélioration de prédiction a été quantifiée par NRI continue et catégorielle. La robustesse tient à la taille des cohortes et à la réplication dans deux contextes distincts. Quelques limites sont à considérer : conversion mg/dL→nmol/L imparfaite pour la Lp(a), faible proportion de participants très à haut risque, usage des statines minoritaire au départ, effectifs réduits dans certains sous-groupes raciaux/ethniques, et indisponibilité de toutes les covariables des versions « étendues » ou à 30 ans de PREVENT. UK Biobank expose en outre un biais de sélection de volontaires en meilleure santé. Malgré cela, PREVENT s’est montré correctement calibré chez les sujets avec Lp(a) élevée.
Selon les auteurs, le score PREVENT peut rester l’outil de base de stratification. Mesurer la Lp(a) au moins une fois chez un adulte, notamment quand le risque PREVENT est bas ou faible-intermédiaire, aide à personnaliser la décision autour des statines, d’un éventuel antiagrégant et de l’intensification du contrôle tensionnel et métabolique. En l’absence de seuils officiels propres à PREVENT, les cliniciens peuvent s’appuyer sur les catégories usuelles (<5 %, 5 à <7,5 %, 7,5 à <20 %, ≥20 %) en gardant à l’esprit que la Lp(a) déplace modestement le curseur, surtout aux faibles risques. Les perspectives de recherche incluent l’évaluation à 30 ans, une étude dédiée des effets selon l’ascendance, et l’intégration de Lp(a) dans des versions améliorées du calculateur, éventuellement combinées à d’autres marqueurs fortement discriminants comme le score calcique coronaire.