Cerveau

Ce somnifère peut-il vraiment agir contre Alzheimer ?

Le lemborexant, un somnifère déjà utilisé contre les troubles du sommeil, réduirait les dommages dans le cerveau liés à la protéine tau, un marqueur clé de la maladie d’Alzheimer, selon une étude.

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  • 19 Jun 2025
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    Et si mieux dormir permettait de mieux protéger notre cerveau du déclin cognitif ? C'est l'hypothèse sérieusement explorée par des chercheurs américains de la Washington University School of Medicine, qui ont publié une étude prometteuse dans la revue Nature Neuroscience. En collaboration avec le laboratoire pharmaceutique japonais Eisai, ils ont découvert qu’un somnifère courant, le lemborexant, pourrait freiner les dégâts cérébraux provoqués par des maladies comme l’Alzheimer.

    Un médicament contre l’insomnie qui protège le cerveau

    Depuis plusieurs années, la communauté scientifique suspecte un lien fort entre troubles du sommeil et apparition de maladies neurodégénératives. Le cerveau utilise notamment les phases de sommeil profond pour nettoyer les protéines toxiques qui s’accumulent au fil de la journée. Quand ce processus est perturbé (par des nuits trop courtes ou un mauvais sommeil), ces substances s’accumulent, favorisant ainsi l’apparition des protéines amyloïde et tau, marqueurs clés de la maladie d’Alzheimer.

    Le lemborexant est un médicament déjà utilisé contre l'insomnie. Il agit en bloquant les récepteurs à l'orexine, une molécule impliquée dans le cycle veille-sommeil. Or, les chercheurs ont observé que ce mécanisme pourrait aussi réduire l'accumulation de tau. "Lemborexant améliore le sommeil et réduit l'accumulation de tau, qui semble être un des principaux moteurs des dégâts neurologiques observés dans ce type de maladies neurodégénératives", explique le Dr David Holtzman, neurologue et auteur principal, dans un communiqué.

    Chez les souris génétiquement prédisposées à accumuler de la protéine tau, le lemborexant a permis de préserver jusqu'à 40 % de volume en plus dans l'hippocampe, une région clé du cerveau impliquée dans la mémoire. Contrairement au zolpidem, un autre somnifère testé dans les mêmes conditions, le lemborexant n'altère pas la coordination motrice et réduit bien l'inflammation et la mort des neurones. Selon les scientifiques, il empêcherait les modifications chimiques excessives de tau, responsables de sa toxicité.

    Vers une nouvelle voie thérapeutique ?

    Curieusement, les effets neuroprotecteurs n'ont été observés que chez les souris mâles. "Les souris femelles présentent naturellement une neurodégénérescence moins sévère. Il se peut que les effets du médicament y soient donc plus difficiles à détecter", avance Holtzman. Des recherches sont en cours pour mieux comprendre les origines de cette différence.

    Les traitements actuels contre l’Alzheimer, notamment les anticorps dirigés contre la protéine amyloïde, demeurent peu efficaces. Associer plusieurs approches - contre tau et amyloïde - pourrait être la clé, selon les experts. "Nous avons besoin de solutions qui réduisent l'accumulation anormale de tau et l'inflammation associée", souligne Holtzman. Si ses résultats sont confirmés chez l’humain, le lemborexant pourrait donc constituer une voie thérapeutique complémentaire.

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