Cardiologie

Insuffisance cardiaque : vacciner contre la grippe avant la sortie réduit décès et réadmissions

Chez des patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque aiguë (NYHA III–IV), l’administration systématique du vaccin grippal avant la sortie diminue, à 12 mois, le risque combiné de décès ou de réhospitalisation. Cette stratégie hospitalière, simple et peu coûteuse, est sûre et hautement transposable.

  • Natali_Mis/istock
  • 09 Septembre 2025
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    Grippe et insuffisance cardiaque forment un couple délétère, avec une surmortalité et des hospitalisations accrues en période d’activité virale. Face à une couverture vaccinale très hétérogène, le programme PANDA II a évalué une approche pragmatique : proposer la vaccination antigrippale gratuitement avant la sortie d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque aiguë. Dans cet essai randomisé en cluster mené sur trois saisons hivernales (2021–2024) dans 164 hôpitaux chinois, 7771 adultes ont été inclus (3570 intervention ; 4201 soins usuels). L’objectif principal associait mortalité toute cause ou toute réadmission à 12 mois.

    Selon les résultats publiés dans The Lancet, un événement du critère principal est observé chez 41,2 % des patients vaccinés versus 47,0 % en soins usuels, soit un OR 0,83 (IC à 95 % 0,72–0,97 ; p=0,019). Traduit données pratiques : le nombre nécessaire de malades à vacciner pour prévenir un décès ou une réadmission est de 27 (IC à 95 % 14–500).

    Un levier préventif au cœur du parcours de soins : bénéfice clinique démontré

    L’intervention a atteint une couverture quasi universelle (94,4 % vaccinés) contre 0,5 % en soins usuels, validant la faisabilité opérationnelle d’un circuit vaccinal intégré en service de cardiologie. Le bénéfice s’observe de manière concordante sur les critères secondaires et les sous-groupes préspécifiés, sans hétérogénéité cliniquement significative.

    Les événements indésirables graves sont moins fréquents sous intervention : 52,5 % versus 59,0 % (OR 0,82 ; IC à 95 % 0,70–0,96 ; p=0,013), sans signal de sur-risque spécifique lié au vaccin. Ces données confortent l’intérêt d’une protection en amont des pics saisonniers, particulièrement chez des patients fragiles, faiblement mobiles et exposés aux décompensations infectieuses.

    Un essai pragmatique en vie réelle

    PANDA II est un essai multicentrique, multirégional, parallèle, à randomisation par hôpital et par saison, comparant vaccination à l’hôpital avant la sortie versus soins usuels, avec suivi standardisé à 1, 3, 6 et 12 mois. L’analyse hiérarchique à deux niveaux (effet fixe « saison », effets aléatoires « hôpital » et « hôpital-saison ») dans une population modifiée en intention de traiter renforce la validité interne d’un design volontairement pragmatique. La généralisabilité est soutenue par la diversité des sites de comtés ; elle reste toutefois limitée par le contexte semi-urbain chinois, l’absence d’aveugle patient-soignant et les fluctuations concomitantes d’activité grippe/COVID susceptibles d’atténuer l’effet observé.

    Selon les auteurs, ces résultats plaident pour institutionnaliser la vaccination antigrippale avant la sortie chez tout patient hospitalisé pour insuffisance cardiaque aiguë, au même titre que l’optimisation thérapeutique et l’éducation à la sortie. L’intégration dans des ordonnances de sortie, des protocoles infirmiers et des incitations organisationnelles peut lever les barrières d’accès et homogénéiser la couverture. Les priorités de recherche portent sur la mesure d’effets différentiels selon le « match » vaccinal saisonnier, l’impact médico-économique et l’extension à d’autres populations cardiovasculaires à haut risque. À court terme, la fenêtre d’hospitalisation doit être considérée comme un moment clé de prévention : vacciner, c’est éviter des réadmissions et potentiellement sauver des vies.

     

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