Rhumatologie
Pseudo-polyarthrite rhumatoïde : épargne cortisonique et amélioration de la qualité de vie avec un anti-IL6
Chez des patients souffrant d’une pseudo-polyarthrite rhizomélique en rechute, le blocage du récepteur de l’IL-6 est associé à une décroissance rapide des corticoïdes et améliore cliniquement la qualité de vie à 52 semaines par rapport à une décroissance longue dess corticoïdes associés à un placebo.

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Fréquente après 50 ans, la pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR) altère les capacités fonctionnelles et la qualité de vie des malades, avec une dépendance prolongée aux corticoïdes exposant jusqu’à 65 % des patients à des effets indésirables. L’axe IL-6, central dans l’inflammation systémique et possiblement impliqué dans la sphère psycho-cognitive, constitue une cible rationnelle. Dans l’essai de phase 3 SAPHYR, randomisé, en double aveugle, multicentrique (60 centres/17 pays), des adultes en rechute lors de la décroissance des corticoïdes (≥ 7,5 mg/j dans les 12 semaines) ont reçu soit du sarilumab 200 mg toutes les 2 semaines avec un sevrage en 14 semaines, soit un placebo avec un sevrage en 52 semaines.
Selon les résultats publiés dans The Lancet Rheumatology, sur 118 patients randomisés et suivis 52 semaines, le sarilumab conduit à des améliorations supérieures des scores SF-36 : composante physique (PCS) +7,65 vs +2,87 (p = 0,020) et composante mentale (MCS) +3,04 vs –1,71 (p = 0,030), étayées par des gains sur cinq domaines sur huit. L’effet clinique s’accompagne d’un meilleur indice utilité EQ-5D (+0,11 vs –0,02 ; p = 0,034) et d’une tendance favorable sur la fatigue (FACIT-F +7,91 vs +4,17 ; p = 0,060) et la fonction (HAQ-DI –0,39 vs –0,15 ; p = 0,054).
Ce que montrent les critères secondaires et la tolérance
Au-delà des critères principaux, les patients sous sarilumab ont eu des diminutions plus importantes des EVA douleur (–20,57 vs –12,04 ; p = 0,20) et de l’EVA évaluation globale patient (–15,01 vs –6,08 ; p = 0,13), avec une amélioration de l’EQ-5D EVA (+8,37 vs –0,46 ; p = 0,084). La proportion de patients atteignant au moins la différence cliniquement minimale importante sur le SF-36 PCS est plus élevée sous sarilumab (OR 3,46 ; IC à 95 % 1,16–10,62 ; p = 0,020). Fait notable, plus de 50 % des patients du bras sarilumab atteignent des valeurs normatives pour le MCS et quatre domaines du SF-36, contre aucun domaine dans le bras placebo.
Les analyses par sous-groupes, stratifiées sur la sévérité initiale (PMR-AS), confirment un bénéfice croissant lorsque la maladie est plus active. Côté tolérance, le profil observé est celui attendu des anti-IL-6 : neutropénie et diarrhée plus fréquentes sous sarilumab ; des arthralgies ont été davantage rapportées que dans la polyarthrite rhumatoïde traitée par la même molécule, sans signal inattendu. À l’inclusion, la fatigue modérée à sévère concernait 73 à 74 % des patients, soulignant l’atteinte fonctionnelle majeure que l’intervention a contribué à alléger.
D’où viennent ces données et que faire demain ?
La méthodologie robuste (essai randomisé, double aveugle, analyse en intention de traiter) renforce l’interprétation, mais plusieurs limites incitent à la prudence : effectif modeste, arrêt prématuré de l’étude, p-values nominales, et absence de validation psychométrique exhaustive des PROMs dans la PPR. La population majoritairement blanche (83 %) peut restreindre la généralisabilité. Malgré cela, la convergence des bénéfices sur les mesures rapportées par les patients – incluant qualité de vie générale, fatigue, fonction et douleur – et l’épargne cortisonique rapide plaident pour intégrer le sarilumab chez les adultes en PPR en rechute, insuffisamment contrôlée par les corticoïdes seuls ou intolérants à leur décroissance.
Selon les auteurs, en cas de rechute lors de la décroissance de la corticothérapie, on peut envisager un schéma par sarilumab 200 mg toutes les deux semaines, avec sevrage des corticoïdes sur 14 semaines selon un protocole structuré et une surveillance hématologique et infectieuse rigoureuse. Les perspectives de recherche incluent la confirmation de ces résultats à plus grande échelle, l’affinement des seuils de pertinence clinique des PROMs dans la PPR, l’identification des phénotypes répondeurs (notamment formes à haute activité) et l’évaluation comparative avec d’autres agents ciblant l’IL-6. Dans un contexte où les autorités américaine (2023) et européenne (2024) ont déjà approuvé l’usage du sarilumab dans la PPR, ces résultats soutiennent une évolution des recommandations vers une stratégie « treat-to-target » centrée sur la réduction de la toxicité cortisonique et l’amélioration tangible de la qualité de vie