Dépistage
Suicide : les outils d'IA sont insuffisants pour prédire le risque
La précision de l’intelligence artificielle afin de prédire le comportement suicidaire est trop faible pour être utile au dépistage ou à la priorisation des personnes à haut risque pour les interventions.

- Par Geneviève Andrianaly
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- EvilWata/iStock
"Chaque année en France plus de 9.000 personnes meurent par suicide et près de 200.000 tentent de mettre fin à leurs jours." C’est ce qu’a signalé le gouvernement à l’occasion de la journée mondiale de prévention du suicide, le 10 septembre dernier. Deux jours après, des chercheurs australiens ont publié une étude, dans la revue Plos Medicine, qui évalue la précision des algorithmes d'apprentissage automatique pour prédire le suicide et l'automutilation nécessitant une hospitalisation, dont le développement a connu une expansion rapide.
Suicide, automutilation : l’IA est peu efficace pour identifier les personnes à haut risque
Dans le cadre de ces travaux, l’équipe australienne a passé en revue 53 recherches, qui ont été incluses, car elles examinaient les résultats en matière de suicide ou d'automutilation traités à l'hôpital. Au total, la méta-analyse a porté sur plus de 35 millions de dossiers médicaux et près de 250.000 cas de suicide ou d'automutilation hospitalière. Selon les résultats, les algorithmes présentaient une sensibilité modeste, entre 45 % et 82 %, et une spécificité élevée, entre 91 % et 95 %, "c'est-à-dire un pourcentage élevé de personnes identifiées comme à faible risque qui n'ont pas recommencé à s'automutiler ou à se suicider." Si l’intelligence artificielle excelle afin d’identifier les patients qui ne risquent pas à nouveau de s'automutiler ou se suicider, elle est généralement peu efficace pour identifier les personnes qui le feront. Dans le détail, les auteurs ont observé que les algorithmes classaient à tort comme à faible risque plus de la moitié des participants qui se sont ensuite présentées aux services de santé pour automutilation ou suicide. Parmi les volontaires classés à haut risque, 6 % se sont suicidées et moins de 20 % se sont à nouveau présentées aux services de santé pour automutilation.
"Nous ne voyons aucune preuve justifiant une modification de ces recommandations"
Selon les scientifiques, les propriétés prédictives de ces algorithmes d'apprentissage automatique étaient médiocres et pas meilleures que celles des échelles traditionnelles d'évaluation des risques. "Nous ne voyons aucune preuve justifiant une modification de ces recommandations. (…) Pour les populations hospitalisées pour automutilation, la prise en charge devrait plutôt inclure trois éléments pour tous les patients : une évaluation et une réponse basées sur les besoins, l'identification des facteurs de risque modifiables avec un traitement visant à réduire ces expositions et la mise en œuvre d'interventions de suivi dont l'efficacité a été démontrée", ont conclu les chercheurs.