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Cancer de l'ovaire : quelles solutions pour surmonter l'impact sur la vie sexuelle ?
Le traitement du cancer de l'ovaire a des conséquences importantes sur la vie sexuelle et intime. Le Dr Philippe Toussaint, oncologue et sexologue, réagit au témoignage d'une patiente et aborde les solutions pour un retour à une sexualité épanouissante.

- Par Paul-Emile François
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- iStock/Panuwat Dangsungnoen
Plusieurs années après avoir été soignée pour un cancer de l'ovaire en 2013, cette femme, membre de l'association Imagyn qui rassemble des patientes atteintes de cancers gynécologiques, porte encore dans sa voix toute la souffrance ressentie lors de la reprise de sa vie sexuelle. "Effroyable !", résume-t-elle. "C'était douloureux, traumatisant, je ne comprenais pas ce qui se passait, aucun professionnel de santé ne m'avait informée des problèmes physiques à la suite de la chirurgie".
Parmi les conséquences de la prise en charge de sa maladie, la sécheresse vaginale, un des principaux effets secondaires du traitement de ce cancer. "Je l'ai découverte au moment de la reprise des rapports sexuels, la pénétration était difficile, douloureuse... à l'époque les médecins ne nous informaient pas de ces séquelles physiques, ils ne parlaient que des nausées, de la perte des cheveux, de douleurs neuropathiques, mais rien sur la sexualité"."Les problématiques intimes sont fréquentes dans les cancers gynécologiques"
"Les problématiques intimes dans la prise en charge de cancers sont très fréquentes, en particulier dans les cancers gynécologiques", confirme pourtant le Dr Philippe Toussaint, oncologue médical et sexologue au Centre Léon Bérard à Lyon. "Les patientes relatent dans une littérature qui est maintenant riche leurs difficultés, sécheresse vaginale, douleur pendant les rapports, problèmes de libido et de désir sexuel, capacité à se sentir désirable, attirante, la capacité à pouvoir reprendre une sexualité après les traitements et ces problématiques ne sont pas souvent abordées, notamment au moment du diagnostic".
Le sujet est donc connu. Mais le soutien aux patientes manifestement pas toujours systématique. Pourtant, et le Dr Philippe Toussaint insiste sur ce point, des solutions "simples" existent. "L'essentiel est d'abord de rassurer les femmes qui rencontrent ces difficultés, leur dire 'vous n'êtes pas anormales'!".
"La patiente actrice de sa rééducation"
Certes, mais si ces mots peuvent dédramatiser, que faire, concrètement ? "Il existe les traitements de fond que sont les produits hydratants, répond Philippe Toussaint, ceux-ci permettent de rétablir la souplesse des organes sexuels". Et il précise que leur utilisation est d'autant plus efficace si "la patiente devient actrice de sa rééducation" avec une application manuelle permettant de "reprendre conscience de ce qui se passe au niveau intime". Pour le sexologue, le principal objectif avec ces hydratants est de permettre aux patientes de reprendre la maîtrise de leur vie intime : "Plus elles oseront se faire confiance intimement, plus il leur sera facile de reprendre une vie de couple, d'être à l'aise". Y compris, assure-t-il, en s'aidant si nécessaire d'accessoires, sextoys ou vibromasseurs.
A côté de ces produits hydratants et de leur bonne utilisation, le sexologue recommande également l'usage de lubrifiants. "Il faut s'en servir durant les moments intimes, ils facilitent le toucher, le contact entre partenaires", précise-t-il en préconisant des produits qui peuvent avoir "une valeur érotique importante". Et puis il existe, ajoute Philippe Toussaint, d'autres moyens techniques comme les dilatateurs vaginaux et, aujourd'hui, de nouvelles pratiques basées sur l'utilisation du laser mais qui sont, précise-t-il "coûteuses et avec des preuves scientifiques de leur efficacité qui ne sont pas établies".
"Discuter avec les professionnels de santé et éviter les non-dits"
Peut-on pour autant se passer, afin de retrouver une sexualité épanouissante après un cancer de l'ovaire, de l'accompagnement des professionnels de santé ? "Si les premières solutions évoquées ne marchent pas, les patientes peuvent évidemment avoir recours à ces professionnels formés aux problèmes intimes que sont les gynécologues, les sexologues, voire les sage-femmes et aussi les psychologues pour travailler sur la communication dans le couple... Il faut en effet éviter les non-dits pour ne pas créer de problèmes supplémentaires", suggère Philippe Toussaint. Dans tous les cas, il rappelle que face à l'impact du cancer sur la vie intime et sexuelle, "il ne faut pas avoir peur d'en discuter avec des professionnels de santé parce qu'il est important que l'activité sexuelle redevienne rapidement plaisante, agréable, qu'elle soir une source de joie et de bonheur".